Extrait d'un texte magistral de Louis Even (texte complet
ici)
les archives complètes de Louis Even sont disponibles ici
http://www.michaeljournal.org/causeries/causeriesmp3.htmL'heure de la franc-maçonnerie
Vint 1960. Les précurseurs que nous avons mentionnés, et d'autres, avaient préparé le terrain pour des changements de taille dans la province de Québec. L'élection de cette année-là favorisa ces desseins, en portant le parti libéral au pouvoir, pour la première fois depuis la Seconde Guerre Mondiale.
Les membres les plus influents du nouveau gouvernement étaient, avec le premier ministre Jean Lesage, Paul Gérin-Lajoie, René Lévesque le favori de Moscou, et Pierre Laporte. Ils ne perdirent pas de temps. On ne tarda pas à entendre la -publicité faite au projet de la nationalisation des compagnies productrices d'électricité, projet moussé par le socialiste René Lévesque. Et surtout celle faite au projet, parrainé par Paul Gérin-Lajoie, d'une « Grande Charte de l'Éducation », qu'il aurait pu aussi bien appeler « Charte maçonnique de l'Éducation ».
Les forces athées et maçonniques virent, en effet, leur chance. Ce qu'elles n'avaient pu obtenir 50 années auparavant; à, l'époque de, la loge maçonnique canadienne-française « L'Émancipation », il leur fallait le réussir maintenant. L'accélérateur fut poussé à fond.
Le 8 avril 1961, Marcel Rioux, Maurice Blain, avec quelques autres de même calibre, fondaient le Mouvement Laïque de Langue, Française, pour presser la laïcisation du système scolaire (alors confessionnel) au Québec. Cette fondation, à laquelle assistaient 500 à 600 personnes, se fit dans la salle sociale de l'Université de Montréal une université possédant une charte pontificale romaine, avec comme chancelier l'Archevêque' de Montréal, qui était alors un cardinal, et comme recteur un dignitaire ecclésiastique de l'archidiocèse ! Mais que ne voit-on pas aujourd'hui, et que signifie encore le mot, « catholique » même pour des prêtres, même pour des évêques?
Un cardinal dans le courant
D'ailleurs, l'Archevêque de Montréal était alors le Cardinal Paul-Émile Léger, version 1961 et non plus version 1950.
Le cardinal Léger de 1961 était-il donc différent de l'archevêque Léger de 1950? Malheureusement oui. Il était acquis aux idées des « émancipateurs », le dos au passé et engagé dans les voies du progressisme, plongeant dans un inconnu à découvrir (expression de Gérard Pelletier).
C'est le trio Trudeau-Pelletier-Hébert qui fut le premier surpris en même temps que le premier à savourer ce changement. C'est ce que Gérard Pelletier relate dans un article paru dans « Le Devoir » du 24 novembre 1967, relativement sans doute à la démission par le cardinal de l'archevêché de Montréal. L'article se voulait sans doute aussi à la louange du cardinal. Gérard Pelletier faisait le récit de la rencontre du trio avec le cardinal Léger en janvier 1961 et la comparait avec une précédente rencontre en 1952.
En 1952, le cardinal les avait mandés pour leur exprimer ses inquiétudes au sujet de leurs écrits dans « Cité Libre » surtout. Il ne voulait pas aller jusqu'à une condamnation hâtive et publique, mais il les mettait en garde. L'entrevue leur avait laissé un souvenir désagréable. Ils ne s'étaient pas revus depuis. Aussi nos trois avant-gardistes •de la « révolution tranquille » furent-ils intrigués quand,- neuf années plus, tard, ils reçurent de l'archevêché une invitation à dîner avec le cardinal à sa maison de Lachine. Serait-ce une manière de les avoir pour leur filer de nouveaux reproches ?
Mais non. C'est le cardinal qui leur ouvrit lui-même la porte quand ils arrivèrent à la maison de Lachine. Lui-même aussi qui leur servit l'apéritif. Ils causèrent de pays visités par les uns et les autres. Puis, à table, le cardinal parla de sujets plus actuels, du conclave qui avait élu le pape Jean XXIII, des préparatifs d'un concile oecuménique. Mais, écrit Gérard Pelletier
« La vraie surprise de cette rencontre, nous l'éprouvâmes quand la discussion vira sur nos problèmes internes. Sans doute avions-nous nous-mêmes mûri au cours de ces neuf ans. Sans doute encore est-il plus facile démesurer l'évolution des autres que la sienne propre. Mais de toute évidence, le cardinal de 1961 n'était plus le même homme que l'archevêque de 1952. Et le Concile n'était pas encore inauguré...
« Entre la poire et le fromage, nous fîmes l'inventaire, non plus des distances qui nous séparaient, mais, au contraire, des attitudes que nous partagions désormais. Il acceptait de Plonger dans l'inconnu.... Il savait qu'une grave crise spirituelle guettait notre chrétienté nord-américaine. Mais il a accepté d'y faire face ...
La présence de l'Église devait changer de forme, et tous les changements dont il devait être le promoteur et l'auteur, tous les nouveaux horizons qu'il devait ouvrir à l'Église pendant et après le Concile, il les avait conçus déjà ou du moins ébauchés dans son esprit et nous en parlait sans détour pendant cette soirée neigeuse de janvier 1961 ... à nous qui avions été ses bêtes noires simplement parce que nous vivions 'nos vies de laïques au coeur de l'action et aux écoutes d'un Québec qui se cherchait lui-même. La soirée de Lachine a marqué pour nous une étape ».
Ainsi le trio Trudeau-Pelletier-Hébert — et donc la bande des persifleurs de notre chrétienté québécoise — avaient dès, lors un haut prélat à leur goût, l'archevêque à la tête du plus grand nombre de catholiques dans tout le commonwealth britannique.
Triomphe maçonnique
Ce n'était certainement pas le Cardinal Léger qui allait opposer une résistance à la dissolution du Conseil confessionnel de l'Instruction Publique et à son remplacement, tant attendu des Loges, par un ministère de l'instruction ou de l'éducation. Bien au contraire, il neutraliserait plutôt l'opposition que d'autres évêques y avaient exprimée.
L'opération fut consommée par l'adoption du fameux Bill 60 en 1964. Malgré certains points de-second ordre établissant des comités confessionnels qui pourraient soumettre des désirs au ministre, le train scolaire était dès lors placé sur les rails vers la pleine laïcisation. La suite l'a démontré.
Le premier ministre Jean Lesage avait pourtant déclaré publiquement que, tant qu'il serait à la tête du gouvernement, il n'y aurait pas de Ministère de l'Éducation dans Québec. Mais Jean Lesage pouvait bien céder aux poussées qui, l'entouraient quand les Évêques eux-mêmes capitulaient acceptant leur mise au rancart comme des garnements pris en défaut.
Le parti libéral se glorifiait de la « révolution tranquille » mise en marche par lui au Québec. Pourquoi s'arrêter ? Il ne prévoyait sans doute pas que d'autres la trouveraient trop tranquille et qu'un ministre d'alors (Pierre Laporte) serait six ans plus tard la victime de révolutionnaires plus pressés.
Le gouvernement de Québec établit avec le gouvernement de Paris des « échanges culturels », des professeurs de France venant enseigner au Québec pour un terme donné, et un égal nombre de professeurs québécois allant faire un stage équivalent d'enseignement dans des écoles françaises. Excellent moyen de maçonniser nos écoles, le •tri étant fait à Paris par le ministère d'un franc-maçon; et nos professeurs canadiens revenant d'un stage en France avec des idées nouvelles et un prestige accru pour les faire valoir chez nous.
La paganisation de notre enseignement s'étendit rapidement dans tout le système, du primaire au préuniversitaire. La promiscuité dans les écoles et dans les autobus y transportant, l'indiscipline, la circulation de drogues et de littérature érotique, etc., ont produit ce que tout le, monde voit : la laxité des moeurs; l'ignorance en matière religieuse, le mépris de l'autorité des parents, le tout s'aggravent d'une année à l'autre. L'impudeur, les exhibitions de la chair, les conversations lascives, les journaux d'étudiants rivalisant d'articles voltairiens, blasphématoires et impudiques, sont devenus tellement affaire courante que presque personne n'essaie plus d'enrayer le déferlement de cette vague de pourrissement. Peut-on s'étonner, après cela, que de telles plantations sortent des fruits qui empestent, qui bouleversent, qui horrifient?
Syndicats
Nous n'avons donné que quelques noms et touché seulement quelques secteurs. Que ne faudrait-il pas dire des unions ouvrières? Des syndicats qui, autrefois étiquetés catholiques, se sont tellement éloignés des objectifs proclamés lors de leur fondation qu'ils ont secoué leur étiquette, dont, d'ailleurs, ils avaient pris honte. Les syndicats sont devenus, de plus en plus, des bouillons de culture de socialistes, de communistes ouverts ou cryptos, et des officines de grèves qui perturbent la vie sociale et servent d'entraînement à des révolutions à venir.
Que n'est pas devenue la CSN, par exemple, avec les Gérard Picard, le Gérard Pelletier (l'homme de partout), les Jean Marchand (celui-ci devenu lui aussi ministre dans le gouvernement Trudeau) ? Et ça continue sous la direction de leurs successeurs.
A force d'insistance et en faisant jouer leur influence ou leur chantage auprès de partis qui comptent le nombre d'électeurs à gagner ou garder plus importants que les principes en politique, les syndicats ont obtenu le droit de grève même dans les services publics, et ils se sont hâtés d'en profiter, On a eu des grèves criminelles, qui n'avaient souci ni de malades dans les hôpitaux, ni du bien des enfants dans les écoles. On a même connu une grève, Dieu merci courte, dans le service des pompiers-et des gardiens de la sécurité, dans" la plus grande ville du Canada.
En terminant
Mais terminons ces réflexions sur les événements d'octobre au Québec par une note moins attristante, car il advient souvent que Dieu dans- sa bonté tire le bien du mal. A la méditation, nous sommes portés à voir dans ces faits bouleversants une grâce du Ciel, un avertissement à des hommes qui en avaient besoin et qui a provoqué chez plusieurs une prise de conscience. Un Père Franciscain nous disait récemment, et plusieurs prêtres l'ont confirmé, que nombreuses sont les conversions suscitées par ce passage de l'Ange d'un Dieu trop offensé.
Alors, ne faut-il pas se réjouir plutôt que se lamenter? Si c'est l'éloignement de Dieu qui a introduit un cancer révolutionnaire dans notre autrefois si chrétienne province de Québec, n'est-ce pas, par le retour à Dieu dans la vie privée, dans la vie familiale, dans la vie publique, dans les institutions, que ce cancer peut en être extirpé, bien plus efficacement que par des répressions uniquement 'policières, si nécessaires soient celles-ci? Nous le croyons.
Louis Even